La sédation profonde et continue maintenue jusqu'au décès (SPCMJD)
La loi prévoit la sédation profonde et continue provoquant un endormissement profond maintenu jusqu’au décès dans certains cas [Article L.1110-5-2 du CSP]
- A la demande du patient (patient conscient ou ayant exprimé sa volonté dans ses Directives Anticipées (DA) s’il est hors d’état de s’exprimer), si le patient est atteint d’une affection grave et incurable, dont le pronostic vital est engagé à court terme (< 2 semaines), et présente une souffrance réfractaire aux traitements.
- En l’absence de demande du patient, pour les patients ayant fait l’objet d’une décision de « Limitation ou d’Arrêt des Traitements Actifs » au titre du refus de l’obstination déraisonnable, avec pour conséquence un engagement du pronostic à moins de 2 semaines.
La sédation est systématiquement associée à un traitement contre la douleur et à un arrêt des traitements de maintien en vie.
La décision de réaliser une sédation est prise en procédure collégiale, après discussion avec le patient ou à défaut sa personne de confiance, sa famille ou ses proches. La procédure collégiale implique l’équipe médicale et paramédicale et l’avis d’au moins un médecin sans lien hiérarchique avec le médecin qui suit le patient.
Cette procédure et l’avis qui en résulte (acceptation ou refus) doivent être tracés dans le dossier médical et le refus doit impérativement être motivé. La SPCMJD est un droit pour le patient et une obligation pour le médecin : un refus ne peut porter que sur le fait que les conditions légales ne sont pas réunies. Si les proches sont en désaccord avec le patient, c’est la décision du patient qui prévaut (ou celle exprimée dans ses DA).
C’est le plus souvent la persistance de symptômes réfractaires, vécus comme insupportables par le patient et qui ne peuvent être contrôlés en dépit des efforts réalisés pour trouver un traitement adapté, qui motive des demandes de SPCMJD, éventuellement associée à un arrêt des soins. Le but de cette sédation est de diminuer ou faire disparaitre la perception d’une situation vécue comme insupportable par le patient. Il est souvent utile de clarifier ce point avec le patient. En effet la demande de SPCMJD est parfois exprimée comme une demande d’aide à mourir, ou bien certains patients peuvent l’exprimer en lieu et place d’un refus de soin. Approfondir avec le patient ses motivations et représentations est important. Se reporter le cas échéant aux chapitres « Demande d’aide à mourir » et « Le refus de soin ».
Questions à se poser avant de décider d’une sédation :
- Le patient doit être atteint d’une maladie grave mettant son pronostic vital en jeu à court terme (< 2 semaines)
- L’équipe prenant en charge le patient doit avoir consulté l’EMASP
- L’avis du patient a été recherché. S’il ne peut plus s’exprimer son avis est recherché en 1ère intention par les DA si elles ont été rédigées, puis par l’intermédiaire de sa personne de confiance, de sa famille et/ou de ses proches.
- La situation doit être évaluée par plusieurs professionnels : l’avis d’un psychologue ou d’un psychiatre est souvent utile, l’accompagnement psychologique aussi (patient, proches, soignants).
- La décision fait suite à une discussion collégiale et doit être inscrite dans le dossier.
- La sédation doit pouvoir être régulièrement évaluée (profondeur, durée) par un médecin ou une infirmière.
- S’assurer que les objectifs visés par la sédation sont bien compris par les membres de l’équipe prenant en charge le patient.
- Informer le patient des objectifs de la sédation, ses modalités de mise en œuvre et sur ces risques.
Modalités :
Par voie IV :
- 1 mg d’Hypnovel administré en 30 secondes toutes les 2 minutes : diluer 5 mg de Midazolam dans 5 ml de sérum physiologique (concentration de 1 mg/ml). Injecter cette solution ml par ml jusqu’à sédation (score de Richmond à -5* ou score de Rudkin à 5), ce qui détermine la dose d’induction. Puis, s’il est décidé de maintenir la sédation, prescrire une dose horaire égale à 50 % de la dose d’induction.
- Si le contexte ne permet pas de réaliser une titration, il est aussi possible et même recommandé de définir la dose d’entretien en fonction du poids du patient : 0,03 mg/kg/h à 0,2 mg/kg/h soit 2 à 12 mg/h pour 60 kg, après un bolus initial de 1 à 2,5 mg de midazolam en 30 secondes, à renouveler en fonction des besoins.
Par voie SC :
- Dose initiale de 2,5 à 5 mg d’Hypnovel à répéter si besoin selon l’effet, puis, soit renouveler des injections discontinues, soit entretenir la sédation de manière continue, au pousse seringue, avec une dose de 0,03 mg/kg/h à 0,2 mg/kg/h.
Le débit d’entretien doit le plus souvent être adapté régulièrement avec en cas de réveil la possibilité d’un bolus de 1 mg en 30 secondes toutes les 2 minutes.
Echelle de RICHMOND
Echelle de RUDKIN
D’autres agents peuvent être utilisés pour la sédation
- Benzodiazépines : diazepam, chlorazépate,…
- Neuroleptique sédatif : chlorpromazine en complément du midazolam si celui-ci est insuffisant ou dans les cas de confusion et d’agitation.
- La simple sédation pour souffrance réfractaire, ou la prescription d’une sédation anticipée en cas de menace vitale imminente d’un patient non réanimable (ex : hémorragie cataclysmique), doivent être distinguées des SPCMJD : voir chapitre « les différents types de sédation ».
- Le midazolam reste souvent utilisé à visée anxiolytique, ce qui est potentiellement confusionnant. A la différence de la SPCMJD, la sédation à visée anxiolytique n’a pas pour objet d’altérer la vigilance du patient. Pour limiter les confusions il est recommandé d’utiliser dans le cas de l’anxiolyse un autre anxiolytique (si la voie orale est possible : alprazolam, oxazépam, lorazépam, diazepam… Si la voie orale n’est plus possible : clonazépam par voie IV ou SC. Dose initiale : 0,5mg/j maximum 5 mg/j)
Les traitements associés :
- Les traitements antalgiques doivent être maintenus ou mis en route en fonction des résultats de l’hétéroévaluation.
- Il n’existe pas d’indication médicale à la poursuite de l’hydratation mais elle peut être maintenue à faible volume (250 ml/jour) si son arrêt soulève des problèmes. Elle sera arrêtée en cas d’importants œdèmes, épanchements et encombrement bronchique.
- Arrêt des traitements dont le but est de prolonger la vie : alimentation, corticoïdes, anti hypertenseurs, anti diabétiques, ….
Pendant et après la sédation
Des explications sont souvent nécessaires pour la famille comme pour les soignants. Un accompagnement psychologique peut être utile et doit être proposé.
-------------------------------------
Références : Publié par la Haute Autorité de Santé :Guide du parcours de soins.Comment mettre en oeuvre une sédation profonde et continue maintenue jusqu'au décès ?
Fiche repère de la SFAP :
Sédation profonde et continue maintenue jusqu'au décès. Mise en oeuvre médicamenteuse, Mai 2017
Le Ministère des Affaires Sociales et de la Santé :
https://solidarites-sante.gouv.fr/soins-et-maladies/prises-en-charge-specialisees/findevie/ameliorer-la-fin-de-vie-en-france/
La Société française d'accompagnement et de soins palliatifs (SFAP) :
http://www.sfap.org/rubrique/les-recommandations-sur-la-sedation
La Haute Autorité de Santé (HAS) : https://www.has-sante.fr/jcms/c_1003524/fr/label-de-la-has-sedation-pour-detresse-en-phase-terminale-et-dans-des-situations-complexes