Prise en charge du patient suicidaire
Le suicide en cancérologie : RR=1.5 / population générale
I. Facteurs de risque
- Gravité et type de pathologie (risque + important pour Kc ORL et poumon)
- Phase post diagnostic
- Retentissement : douleur, dyspnée, perte d’autonomie, modification de l’image corporelle
- ATCD suicidaires personnels
- ATCD psychiatriques : dépression, trouble bipolaire, schizophrénie, trouble de la personnalité, addiction (alcool, médicaments, drogues…)
- Isolement socio-familial (patients divorcés, séparés ou célibataires)
- ATCD familiaux de tentative de suicide ou de suicide accompli
II. Evaluation et diagnostic du risque suicidaire
Evaluer le contexte : recherche d’événements précipitant
- Symptômes non contrôlés (douleur, dyspnée…)
- Annonce de la maladie, d’une récidive
- Rupture, conflits familiaux, décès d’un proche…
- Difficultés professionnelles, financières…
Evaluer le degré d’intentionnalité
- Propos ou expression d’idées suicidaires
- Plan précis, scenario, ruminations
- Conduite de préparation à l’acte : lettre, testament…
- Moyens létaux à disposition : armes, médicaments…
Evaluer l’état psychologique
- Niveau de souffrance : désespoir, repli sur soi, isolement relationnel, culpabilité, dévalorisation
- Signe d’instabilité psychique : agressivité, agitation, tension psychique, impulsivité
- Anxiété
- Prise de toxique
Evaluer les modifications comportementales / relationnelles
- Isolement
- Conduite à risque
II. Conduite à tenir
Dépend du risque suicidaire et du niveau d’urgence
Niveau I : risque suicidaire Faible
- Peu ou pas de facteurs de risque
- Facteurs précipitant identifiés et solutions possibles (ex : prise en charge des douleurs)
- Degré d’intentionnalité faible
- Pense au suicide mais pas de scénario précis
- Cherche des solutions à ses problèmes
- Est dans une démarche de recherche d’aide - Etat psychologique
- Pas d’instabilité psychique
- Cherche le contact, désire parler
- A établi un lien de confiance avec un praticien - Modifications comportementales/relationnelles
- éventuelles mais sans isolement majeur
- Signifier au patient que l’on a bien compris sa situation et son état de détresse psychologique.
- Lui expliquer l’intérêt d’une aide spécialisée en terme d’évaluation et de prise en charge.
- Initier la prise en charge, en sollicitant une consultation auprès de l’UPO. Le patient ne doit quitter l’hôpital qu’avec un RDV précis dans un délai court (quelques jours).
- Un traitement symptomatique (douleur ++, anxiété) peut être prescrit en attendant le RV (ordonnance pour 7 jours)
Niveau II : risque suicidaire Intermédiaire
Existence de facteurs de risque individuels ou familiaux
Degré d’intentionnalité moyen
- Envisage le suicide comme la seule issue pour arrêter de souffrir
- Une aide apparait possible et n’est pas refusée
Etat psychologique
- Instabilité psychique modérée : anxiété, labilité émotionnelle
- Prise de toxique
Modifications comportementales/relationnelles fréquentes, entrainant l’isolement
En semaine orientation rapide vers le psychiatre (Bip 4856, 4630, ou 6352), sinon première évaluation en urgence par psychologue (4630).
Nuit et WE :
- Expliquer au patient que son état psychologique nous inquiète et qu’une évaluation psychiatrique est indispensable
- Demander à informer sa famille ou un proche
- Sur le plan symptomatique afin de limiter l’anxiété et de réduire l’impulsivité un traitement par Cyamenazine (Tercian) 25 mg (1/2 à 1 cp X 3 /jour) peut être prescrit
- Essayer de garder en hospitalisation si possible
- Si hospitalisation impossible, et en attendant l‘évaluation psychiatrique demandée
S’assurer de la présence de proches ou d’amis auprès du patient en attendant une consultation psychiatrique
Informer le patient et ses proches de la possibilité de consulter en urgence à l’hôpital si besoin
NIVEAU III : risque suicidaire MAJEUR
Existence de facteurs de risque individuels ou familiaux
Degré d’intentionnalité élevé
- Patient décidé
- Passage à l’acte planifié, prévu pour les jours qui viennent
- Conduite de préparation à l’acte (lettres, testament…)
- Accès direct et immédiat à un moyen de se suicider
- Refuse l’aide proposée
Etat psychologique
- Patient paralysé par la dépression ou au contraire agité +++
- Rationnalise sa décision ou au contraire très troublé, émotif, anxieux
- Douleur et souffrance omniprésentes ou complètement tues
- Sentiment « d’avoir tout fait et tout essayé »
Modifications comportementales/relationnelles
- Isolement majeur
Nécessité de prise en charge psychiatrique immédiate (Bip 4856, 4630, ou 6352). Si celle-ci n’est pas possible dans l’immédiat à Gustave Roussy (ex : WE)
Si l’état somatique du patient est compatible avec une hospitalisation en psychiatrie :
- Orientation vers l’établissement psychiatrique de secteur (Coordonnées du secteur accessibles auprès du CPOA à l’Hôpital Sainte-Anne au 01 45 65 81 09/10 avec l’adresse du domicile légal du patient)
- Si refus du patient : une hospitalisation sous contrainte peut être nécessaire. Organiser le transfert en collaboration avec la famille et elle doit suivre la procédure légale suivante :
L'hospitalisation sous contrainte
L'hospitalisation sous contrainte la plus fréquemment utilisée est les Soins Psychiatriques à la demande d’un tiers (SPDT) .
- Quand est-elle justifiée ?
Si les troubles mentaux du patient rendent impossible le consentement aux soins, pourtant nécessaires immédiatement, avec surveillance en milieu hospitalier. Pour la demander il est nécessaire qu'un tiers signe une demande d'admission.
- Qui peut être le tiers demandeur ?
Ce peut être un membre de la famille, un proche, ou une personne justifiant de relations antérieures à la demande de soins et qui lui donne qualité pour agir dans l’intérêt de celui-ci (ami, collègue, voisin…).
- Que doit faire le tiers ?
La demande du tiers doit être entièrement manuscrite, et respecter le modèle présenté. Une photocopie de la pièce d’identité du tiers (ainsi que du patient, s’il en a une) doit être fournie.
- Que doit faire le médecin ?
Procédure simple (SPDT): article L3212-1
Deux certificats médicaux doivent être établis par des médecins inscrits au Conseil de l'Ordre, dont l'examen (et le certificat) doivent dater de moins de quinze jours.
Le premier doit être rédigé par un médecin n'exerçant pas dans l'établissement hospitalier psychiatrique qui accueillera le patient.(donc tout médecin thésé et inscrit à l’Ordre, de Gustave Roussy peut le rédiger).
Le second par un médecin qui peut éventuellement exercer dans cet établissement.
Ces médecins ne doivent pas forcément être psychiatres.
Sont exclus du rôle de certificateur les médecins non thésés, ou non inscrits au Conseil de l'Ordre, les médecins exerçant dans l'établissement d'accueil (pour le premier certificat), les médecins parents ou alliés jusqu'au quatrième degré du tiers demandeur, du malade, ou des directeurs de l'établissement.
Procédure d’urgence (SPDTu) : article L3212-3
Un seul certificat par un médecin thésé (pas forcément psychiatre) est suffisant, accompagnant la demande tiers. L’urgence doit être clairement indiquée dans ce document où doit figurer la phrase « il existe un risque d’atteinte grave à l’intégrité du patient » : cf. modèle.
- S’il est impossible d’obtenir une demande de tiers
C’est la procédure des Soins Psychiatriques pour Péril Imminent (SPPI) art.L3212-1
Un seul certificat médical par un médecin thésé et inscrit à l’Ordre est nécessaire, tant que ce médecin n’appartient pas à l’établissement psychiatrique d’accueil. Il doit apparaitre clairement en quoi il existe un péril imminent, de l’impossibilité d’avoir réussi à joindre un tiers malgré les tentatives. Cf. modèle.
- Où adresser le patient ?
Seul le secteur psychiatrique est habilité à recevoir les patients hospitalisés sous contrainte. Le CPOA (Centre Psychiatrique d'Orientation et d'Accueil), Tél. : 01 45 65 81 09 vous communiquera le secteur dont dépend le patient).
Si l’état somatique du patient est incompatible avec un transfert en psychiatrie :
- Prévenir un passage à l’acte auto-agressif en attendant le début de la prise en charge psychiatrique.
- Surveillance régulière par l’équipe soignante prévenue du risque suicidaire, éviction de tout objet dangereux.
- Sur le plan symptomatique afin de limiter l'anxiété et de réduire l'impulsivité un traitement par Cyamenazine (Tercian) 25 mg (1/2 à 1 cp X 3/jour) peut être prescrit.
Mise à jour avril 2021