Prévention et traitement des fistules pancréatiques
I. Définition
Une fistule pancréatique est définie par un drainage abdominal supérieur à 10 mL par jour et contenant plus de 3 fois le taux sanguin d’amylase entre J3 et J7 postopératoires (Critères ISGPF 2005).
Le dosage d’amylase péritonéale (drain ou lame abdominale) et sanguine doit être systématique à J3, J5 et J7 de toute chirurgie pancréatique avec drainage et lorsque le chirurgien identifie un risque de traumatisme du pancréas, qu’il y ait eu ou non résection pancréatique.
Le risque de fistule pancréatique peut être évalué par un dosage d’amylase péritonéale > 5 000 UI/mL à J 1 postopératoire. En cas de risque avéré par ce dosage, un traitement « préventif » nutritionnel et médicamenteux peut être discuté avec le chirurgien référent.
II. Prévention
Il n’y a pas d’indication à la prescription systématique de dérivés de la somatostatine après chirurgie de l’estomac, du grêle ou du pancréas, dans le but de réduire l’incidence des fistules postopératoires.
III. Traitement
En cas de fistule documentée (drainage > 10 mL et amylase péritonéale > 3 fois amylase sanguine) :
- Le traitement principal repose sur la mise au repos transitoire du tube digestif :
- De préférence : nutrition entérale par sonde naso-jéjunale ou par jéjunostomie, avec une nutrition standard (SONDALIS iso)
- Si voie entérale inutilisable : nutrition parentérale exclusive sur voie veineuse centrale, avec un soluté ternaire (KABIVEN). - La somatostatine (6 mg par 24 heures IVSE) ou l’octréotide (100 µg s/c toutes les 8 heures) doivent être réservés aux formes résistantes à la mise au repos digestif (bien conduit pendant au moins 72 heures) ou d’emblée si risque important de complication infectieuse ou hémorragique.
- Les systèmes de drainage doivent être maintenus en place (arrêt de mobilisation si commencée)
- Un contrôle des dosages sanguin et abdominal d’amylase est recommandé après 3 jours de traitement.
- Une TDM abdominale avec PC iodé IV est recommandée à J7 postopératoire pour rechercher une collection : s’il existe une ou plusieurs collections, elle(s) doi(ven)t être ponctionnée(s) voire drainée(s) en endoscopie interventionnelle, RI ou par voie chirurgicale si contexte infectieux clinico-biologique.
- En cas d’échec des traitements médicaux, une intervention chirurgicale doit être discutée.
- L’alimentation orale peut être reprise lorsque que le débit de fistule est réduit d’au moins 50% et avec amylase péritonéale ≤ 3 fois l’amylase sanguine depuis plus de 72 heures.
- La nutrition artificielle est progressivement réduite en parallèle de l’augmentation des ingesta oraux. Elle peut être interrompue lorsque les ingesta oraux sont ≥ 1500 kcal par jour.
- La posologie de la somatostatine ou l’octréotide est diminuée de moitié pendant 72 heures lorsque que le débit de fistule est réduit d’au moins 50% et avec amylase péritonéale ≤ 3 fois l’amylase sanguine depuis plus de 72 heures, puis arrêt complet.
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B. Raynard, Réanimation, Gustave Roussy, octobre 2012 ------------------------------------------------------- Hichem BELKHODJA - Simona COSCONEA - GUSTAVE ROUSSY - Mise à jour en février 2025