Trachéotomie et trachéostomie
I. Champ d’application
Concerne tous la patients avec trachéotomie chirurgicale (seule ou au cours d’une chirurgie d’exérèse carcinologique)
(Détail de l’intervention et des risques disponibles sur intranet : http://orl01/ORL/ )
La trachéotomie chirurgicale est l’ouverture trachéale par abord direct cervical, pour mise en place d’une canule de ventilation (spontanée ou sans assistance ventilatoire). L’abord trachéal peut être trans-thyroïdien, ou sous-isthmique. L’incision trachéale peut se faire horizontalement entre 2 anneaux cartilagineux, verticalement, en H, en U ou en U inversé, avec ou sans fil de rappel passé par le volet cartilagineux, ou avec fenêtre cartilagineuse par résection de l’arc antérieur d’un anneau trachéal. En cancérologie, elle est indiquée de façon préventive dans les chirurgies entraînant un risque obstructif des voies aériennes supérieures avec des difficultés prévisibles d’intubation secondaire. Elle est d’autre part indiquée dans la prise en charge des dyspnées par tumeur obstructive des voies aériennes supérieures. Elle est aussi indiquée pour protection des voies aériennes inférieures chez les patients présentant des troubles majeurs de la déglutition avec fausses routes (atteintes basi-crâniennes, troubles de la conscience, altérations sensitivomotrices laryngées). Elle est enfin réalisée en réanimation pour ventilation mécanique prolongée, en prévention des complications immédiates et séquelles de l’intubation prolongée. La trachéotomie est quasiment toujours réalisée dans un but transitoire. La manipulation de la canule de trachéotomie est souvent délicate, source potentielle de troubles respiratoires. Cette canule est ainsi le plus souvent constituée d’une chambre externe laissée en place (avec ou sans ballonnet, suturée à la peau ou non), et d’une chambre interne amovible nettoyable. Les complications principales en sont : le saignement péri-orificiel (de la thyroïde ou de la trachée elle-même), le faux trajet (mobilisation de la canule qui n’est plus dans la trachée), le granulome obstructif (bourgeon inflammatoire de la paroi trachéal dû le plus souvent aux aspirations traumatiques répétées, mais qui n’est qu’exceptionnellement obstructif), et la surinfection trachéo-bronchique.
La trachéostomie est définitive. Elle consiste en une suture directe terminale du dernier anneau cartilagineux trachéal à la peau. Elle est réalisée lors de l’exérèse totale du larynx (laryngectomie totale), plus ou moins élargie à la muqueuse pharyngée (pharyngo-laryngectomies totales et circulaires). L’orifice de stomie trachéale est naturellement calibré par le cartilage, et la manipulation de la canule de trachéostomie exceptionnellement source de troubles respiratoires. Dans la phase initiale de cicatrisation la canule est à chambres interne et externe pour les soins (canule acrylique). Secondairement (à partir de J 7 en moyenne) une canule dépourvue de chambre interne (cytube), en silicone souple est mise en place sur laquelle s’adapte un filtre artificiel (échangeur de chaleur et d’humidité ECH) une fois passée la phase d’hypersécrétion trachéobronchique réactionnelle. Cette canule s’enlève à chaque soin.
La trachéostomie comme la trachéotomie entraînent une perte du filtre naturel naso-sinusien de l’air inspiré et de ses fonctions d’humidification, réchauffement et filtrage des particules en suspension de l’air ambiant. Cette perte du filtre naturel associée à la mise en place d’un corps étranger intra-trachéal (canule) et à la réaction inflammatoire chirurgicale sont responsables dans les premiers jours d’une inflammation croûteuse sèche de la muqueuse trachéale (inhibition réflexe de la clairance muco-ciliaire), associée à une hypersécrétion muqueuse épaisse bronchique (œdème exsudatif inflammatoire). Ces réactions sont sources de surinfections bronchiques, à surveiller attentivement et à prélever en cas de doute, et de bouchons croûteux trachéaux, à prévenir par des aspirations régulières atraumatiques et des aérosols.
II. Voies aériennes
Les soins de trachéotomie ou trachéostomie lors des chirurgies d’exérèse carcinologiques cervico-faciales sont développés dans les fiches spécifiques
Les soins généraux comportent :
- Des aspirations régulières pluriquotidiennes trachéales dès J 0
- Des aérosols continus humidificateurs
- Une kinésithérapie respiratoire si besoin dès J 1
- Une surveillance des sécrétions, et des prélèvements bactériologiques si besoin
- Le port régulier d’un filtre trachéal
III. Nutrition
Les soins nutritionnels en chirurgie carcinologique cervico-faciale sont développés dans les fiches spécifiques.
D’une façon générale, il faut retenir que la présence d’une canule de trachéotomie est un frein majeur à la nutrition orale. La fuite salivaire au moins infra-clinique est quasiment systématique. D’une part, à cause de la lésion des voies aéro-digestives supérieures responsable de l’indication de trachéotomie, lésion elle-même source de fausses routes et de troubles de la déglutition.
D’autre part, à cause des modifications anatomiques et fonctionnelles sensitivo-motrices des voies aéro-digestives supérieures induites par la chirurgie carcinologique au cours de laquelle est réalisée la trachéotomie.
Enfin, à cause des conséquences fonctionnelles laryngées de la présence de la trachéotomie elle-même : altérations centrales des arcs réflexes d’ouverture et fermeture glottiques par perte du rétro-contrôle lié au passage du flux aérien, inhibition sensitivo-motrice laryngée intrinsèque, altération motrice laryngée extrinsèque avec défaut d’ascension laryngo-trachéale. L’ensemble de ces éléments indiquent le plus souvent une nutrition entérale sur SNG en présence de trachéotomie. Nous attendons l’ablation de la canule et la fermeture de l’orifice de trachéotomie, avec récupération des fonctions laryngées, avant de débuter la rééducation de la déglution sous contrôle orthophonique.
IV. Cicatrisation
Dans la trachéotomie, après ablation de la canule la fermeture spontanée est la règle. Le délai est variable, de 2 à 15 jours
Pansement semi-compressif sur l’orifice (compresse et pansement sec)
Le patient doit flêchir la tête et appuyer sur le pansement pour appliquer les berges de la cicatrice dès l’ablation de la canule. On ne doit pas entendre de fuite aérienne. Sinon, demander au patient de bien appuyer
Dans la trachéostomie, on surveille les berges de l’orifice, particulièrement à sa face postérieure. Elle y est dépourvue de cartilage, donc fragile et déchirable, et elle est partiellement dévascularisée par la séparation pharyngo-oesophagienne. C’est la zone principale des troubles de cicatrisation et fistules salivaires
V. En cas de sécrétion surinfectée
- Prélèvement bactériologique
- Bilan infectieux biologique (NFS CRP, Hémocultures si t°>38.5°c)
- Antibiothérapie probabiliste par Augmentin en attendant les résultats des prélèvements et antibiogramme